Les thèmes du récit, de l’ambigüité et du mystère sont au cœur de mon travail artistique. J’ai commencé à développer le thème de la forêt mystérieuse à la fin de 2014, durant une résidence d’artiste dans la campagne finlandaise. En 2016, lors d’une résidence de lithographie au Danemark, me trouvant au cœur de l’univers de l’écrivain Hans Christian Andersen, j’ai poursuivi l’exploration de ce thème en m’inspirant plus précisément du conte La petite sirène, dans lequel les notions d’innocence et de jeunesse côtoient celles d’identité, de monde étranger, de mort et de souffrance.
Véritable métaphore du désordre intérieur, la forêt est le lieu de confrontation de nos peurs. Selon le psychanalyste Bruno Bettelheim, la forêt où nous nous perdons symbolise le monde obscur, caché, pratiquement impénétrable de notre inconscient. Petit à petit, j’ai intégré la figure du fantôme à mon travail, accentuant l’idée de perte de repères déjà exprimée par la forêt. Présent tout en étant absent, le fantôme rôde entre la vie et la mort. Il attise la curiosité tout en éveillant des sentiments de peur et d’inquiétude.
Le travail formel dans mes œuvres lithographiques plus abstraites fait écho à la présence du fantôme, les impressions se multipliant, et les marques, les traces, les contours et les formes laissés sur la matrice lors d’impressions précédentes étant exploités de diverses façons sur le papier. Je cherche particulièrement à y mettre en valeur les caractéristiques de la lithographie, sans m’en tenir aux conventions. Le trame de l’effacement commence à s’enraciner, au propre comme au figuré. D’autre part, dans mes séries récentes, ma recherche formelle et esthétique, toujours omniprésente, peut évoquer certains courants de la peinture abstraite du milieu du XXe siècle, qui font parfois eux-mêmes référence aux notions de paysage ou, à l’inverse, sont caractérisés par la perte de sujet. Le titre d’une exposition d’œuvres de Jean McEwen au Musée des beaux-arts de Montréal, en 1988 – « La profondeur de la couleur » – se prêterait particulièrement bien à ce volet de ma recherche. En outre, j’ai de plus en plus recours aux caches, au monotype, aux assemblages, à certains aspects du collage et à la broderie.
The themes of narrative, ambiguity and mystery are at the heart of my artistic work. I began to develop the “Mysterious Forest” theme in November 2014, during a residency (painting and photography) in the Finnish countryside. In 2016, during a lithography residency in Odense, Denmark, birthplace of Hans Christian Andersen, I made a series of prints inspired by the tale The Little Mermaid in which a sense of innocence and youth coexist with notions of identity, strangeness, death, and suffering.
A true metaphor for inner disorder, the forest is the place where one faces one’s own fears. According to psychoanalyst Bruno Bettelheim, the forest symbolizes the dark, hidden, practically impenetrable part of our unconscious. Slowly I started to integrate the figure of the ghost into my work, accentuating the idea of loss of reference points. Present while being absent, the ghost prowls between life and death. It arouses curiosity while awakening feelings of fear and anxiety.
In my more abstract works, the formal research conveys references to the ghost through the adding of layers. Marks, traces and shapes left on the matrix from previous impressions are exploited in various ways on the paper, without being limited by printmaking conventions. I occasionally use drawing, masks, monotype, assemblage, collage, and embroidery to enrich the experimentation.